Page:Leo - Marie - la Lorraine.djvu/4

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rons tout à l’heure où cela mène.

Mathurin donc savait prendre le mieux où il le trouvait, sans trop courir au nouveau ni tenir à la routine ; il observait tout bonnement les choses et leurs résultats. Pour aller voir telle culture dont on parlait, telles étables bien tenues, tels procédés de fabrication, etc., il fit souvent plus d’un voyage dans ses alentours ; tâchant ensuite, selon ses moyens, de faire chez lui ce qu’il avait trouvé de bon chez les autres. Pour lui, il n’avait point d’argent à mettre en constructions ni en achats d’instruments. Seulement, le dicton anglais : Le temps est de l’argent, était du français pour lui ; et cette sorte d’argent-là il l’employait si bien sans en rien perdre, que petit à petit tout prit une bonne tournure autour de lui et alla de mieux en mieux. Ses bœufs, ses vaches, ses moutons, et ses porcs aussi, avaient des étables propres à faire plaisir ; car il avait coutume de dire : La propreté, c’est la santé du bétail ! comme des humains. Il ne ménageait point non plus le fourrage à ses bêtes, disant : Ce qu’on leur donne en foin, elles le rendent en graisse ou en travail ; c’est comme l’engrais pour la terre : plus on donne, plus on reçoit.

C’est le tas de fumier de Mathurin Chazelles qui, par rapport à l’étendue de ses terres, était le plus gros de la commune et le mieux entretenu. Il l’avait placé un peu à distance de la maison, sur une aire bien battue, enduite de terre glaise, et sous un gros châtaignier qui lui faisait en été une ombre épaisse ; car ou sait que le soleil n’est pas dégoûté d’en pomper les sucs, au grand dommage des terres, qui n’en reçoivent ainsi que la carcasse ; comme, sans comparaison, serait un poulet brûlé dont il ne reste plus que les os et la peau, le feu ayant desséché le reste. Et non-seulement le fermier du Bourny avait soin de mettre son fumier à l’ombre, mais encore de l’arroser avec le purin, pour