Page:Leo - Un mariage scandaleux.djvu/467

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plus ; Mme Bertin n’avait plus de bagues ; nul héritage n’était pendant, et l’on avait perdu l’espoir de marier Lucie. Gustave, endetté de plus en plus, chassait au mariage parmi les filles de marchands, ce qu’improuvait énergiquement la fierté de sa mère. — Peut-être la vieille bourgeoisie fait-elle moins de cas d’un boutiquier que d’un paysan. — Enfin, il ne restait plus qu’une livre du pain de sucre acheté par Mme Bertin, et Clarisse avait besoin de citrons, d’eau de fleurs d’oranger, de sirop, de chocolat, de fécule et de vin vieux. En outre, à force de reprises et de pièces aux genoux, les pantalons de M. Bertin rassemblaient à ceux du plus pauvre journalier, tandis que les omoplates de son habit quotidien, devenues d’un blanc luisant, affichaient de loin sa misère. Il avait encore des souliers, mais, au rebours de toutes choses, ces souliers ne devaient pas avoir de successeurs, le cordonnier de Gonesse ayant juré de ne plus livrer qu’au comptant, et les savetiers de Chavagny ayant décliné l’honneur de la pratique. Ces dames avaient bien chacune une robe de soie, mais les robes de laine tombaient en poussière, et celles d’indienne avaient dans toutes leurs fleurs des jours si ténus et si merveilleux qu’elles ressemblaient à des toiles d’araignée.

De même que ses parents, Clarisse avait espéré une part honnête de l’héritage de M. Grimaud. Elle fut frappée au cœur en se voyant frustrée par sa tante, qu’elle avait jusque-là prise au sérieux comme modèle de vertus domestiques et de dignité. À partir de ce jour, elle fut décidément alitée.

Pour comble de maux, le secours faible, mais bien nécessaire, qu’ils recevaient de chez les Bourdon se trouvait supprimé. Lucie reprit de nouveau ses veilles acharnées ; mais bientôt elle reçut l’avis de ralentir ses envois, parce que le magasin de broderies était encombré ;