Page:Leon Silbermann - Souvenirs de campagne, 1910.djvu/148

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que ce petit accident m’arrivait, j’étais remis sur mon chemin par des personnes complaisantes qui s’empressaient à me rendre service.

Mais aussitôt rentré à la caserne, j’éprouvais l’impression d’être enfermé dans une forteresse ; je trouvais la vie monotone et je me surprenais à regretter la brousse, avec ses fatigues et ses misères, mais aussi avec son indépendance et le charme attirant de ses espaces infinis.

Peu de temps après, je fus désigné pour aller au Tonkin. Nous quittâmes Paris un soir d’été par la gare de Lyon, nos casques coloniaux attachés sur les havresacs. Une foule sympathique nous accompagnait à la gare, et malgré les efforts des gradés qui étaient chargés de nous faire marcher en ordre, des personnes s’approchaient de nous et nous tendaient de petits paquets contenant des provisions, du tabac, des cigares, et quelques pièces de vingt sous. Avec cela les bons mots allaient leur train. C’est bien là le peuple de Paris ; spirituel, blagueur même, mais bon comme pas un et toujours le cœur sur la main.

A Marseille nous embarquâmes sur un de ces piètres bateaux de la trop célèbre Compagnie Nationale qui nous transporta au Tonkin dans les mêmes conditions déplorables qu’à notre retour de Madagascar.