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les fièvres et la dysenterie, nous devons un pieux souvenir, fait de regrets et d’admiration.

Après le combat de Mac-Giang, tous les commerçants et autres indigènes qui demeuraient à proximité du poste n’osèrent plus rester la nuit chez eux. Ils prièrent le capitaine de leur permettre de coucher au poste, ce qui leur fut accordé. Les attaques contre les sentinelles redoublèrent, nos veillées aussi. Tout le territoire était soulevé contre nous. Des bandes armées s’organisaient, tout comme après la guerre du Tonkin. Elles pillaient et tuaient tous ceux qu’elles soupçonnaient d’avoir des relations avec nous. Le 12 novembre, deux enseignes de vaisseau, MM. Gourlanen et Koun, qui se promenaient sur un mamelon à côté du Mont-Aou, furent aperçus par des soldats chinois, saisis et décapités séance tenante. Les auteurs de ce double assassinat en informèrent eux-mêmes l’amiral, ajoutant que les corps des deux officiers avaient été ouverts, leurs cœurs arrachés et jetés aux chiens, et qu’ils en feraient autant avec tous les Français qui leur tomberaient sous la main.

Aussitôt que l’amiral eut appris cette lugubre nouvelle, il ordonna au commandant du poste du Mont-Aou de braquer ses canons sur la canonnière chinoise mouillée dans le fleuve et de déclarer prisonnier de guerre tout le personnel du bord. Dans le nombre, se trouvaient le préfet de Sou-Kaï, le sous-préfet de Haïnam et quelques autres hauts personnages. En même temps, ou donnait l’ordre à deux canonnières de bombarder Ma-Tchéoung, village situé à proximité du lieu où l’assassinat avait été commis, et dont la population se montrait particulièrement hostile envers nous. La canonnière chinoise fut prise à la baïonnette par nos matelots, et son état-major envoyé à bord du d’Entrecasteaux. Le bâtiment fut désarmé et on démonta les principales pièces de sa machine. L’équipage fut laissé à bord, mais surveillé de près ; enfin on mit la main sur cent cinquante fusils trouvés au fond des cales.

Deux canonnières et un croiseur chinois qui se trouvaient