Page:Leon Silbermann - Souvenirs de campagne, 1910.djvu/261

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

autant, le Chinois courait immédiatement chez un officier pour réclamer et une sanction sévère enlevait au coupable toute envie de recommencer.

A la fête du nouvel an chinois (le 19 février), les mandarins apportèrent au commandant les cadeaux d'usage qui furent aussitôt distribués aux troupes. Deux jours après, les Allemands battirent à 60 kilomètres des Tombeaux une colonne chinoise du Petchili. Ils eurent un mort et sept blessés contre deux cents hommes environ hors de combat du côté opposé. Trois jours après le nouvel an, quelques membres de la famille impériale vinrent, avec l'autorisation du général en chef, faire des cérémonies rituelles aux Tombeaux. À cette occasion, le commandant fit placer un poste de surveillance, avec la consigne la plus sévère, pour assurer l'ordre et empêcher que les soldats ne se livrent à des actes d'irrespectueuse curiosité. La cérémonie consista en prières à haute voix, en génuflexions et en une sorte de danse rappelant les entrechats d'un quadrille de barrière. Cette cérémonie quelque peu excentrique se termina par un discours d'un Prince aux assistants. Nous avons rendu les honneurs, c'était l'ordre ; mais nous ne pouvions nous empêcher d'en faire des gorges chaudes.

A Liou-Li-Ho, un incendie s'étant déclaré dans les cantonnements, le capitaine Pujo et deux soldats périrent en voulant éteindre le feu. Qu'il me soit permis de rappeler ici le souvenir de l'officier à la fois énergique et bienveillant qu'était le capitaine Pujo, sous les ordres duquel j'avais servi pendant les débuts pénibles de cette campagne. Il nous avait souvent remontés dans les moments critiques par son exemple et ses encouragements. Homme d'une grande expérience, il avait une connaissance parfaite des hommes et des choses en campagne. C'était le vrai soldat colonial. Et quel cœur ! Jamais je n'oublierai certain jour, à Lou-Kou-Kiao, où nous n'avions rien à manger. Il passait devant ma case noircie de fumée et m'adressa ces