Page:Leon Silbermann - Souvenirs de campagne, 1910.djvu/44

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détachement dans la direction d'Aflou. Nous devions creuser plusieurs puits dans une contrée inhabitée, en prévision d'une colonne qu'on songeait à envoyer dans ces parages. Notre détachement se composait d'une trentaine de légionnaires, d'une trentaine de soldats du bataillon d'Afrique et d'autant de zouaves. Nous montâmes nos tentes-abris dans un immense champ d'alfa, et après avoir réquisitionné des chameaux pour le convoi de ravitaillement qui devait nous apporter des vivres tous les cinq jours, nous commençâmes aussitôt, à la sueur de nos fronts, sous un soleil implacable, le corps nu jusqu'à la ceinture, à creuser des trous dans la terre. Trous profonds, où l'eau s'obstinait à ne pas se montrer. Légionnaires, zouaves et « joyeux » rivalisaient de travail et d'ardeur. On creusait à une profondeur telle que les voix des hommes travaillant au fond ne parvenaient plus à la surface. Enfin l'eau n'apparaissant toujours pas, on décida de combler les trous et d'aller chercher ailleurs. Dans l'espace de deux mois et demi, nous creusâmes ainsi trois puits. Après avoir muré les parois et recouvert l'orifice avec de la terre, nous rentrâmes dans nos postes respectifs.

A peine rentrés à Géryville, il fallut partir aux manœuvres dans le sud. Je n'ai pas l'intention de faire de ces manœuvres une description qui intéresserait peu le lecteur. Je mentionnerai simplement ici la marche en colonnes carrées (ne cherchez pas dans le règlement). Cette formation est, je crois, empruntée aux colonnes des Anglais en Égypte. En fait, elle est avantageuse dans un terrain aussi découvert que le Sud-Oranais, où les charges sont surtout à redouter. Le convoi marche au centre du carré. Rien, absolument rien, ne reste en arrière. Un escadron de spahis, déployé sur un seul rang, forme l'arrière-garde. On bivouaque également en colonne carrée. Les vivres, chameaux, chevaux et autres bestiaux sont groupés au centre du bivouac. L'eau, étant très rare, est transportée