Page:Leon Silbermann - Souvenirs de campagne, 1910.djvu/84

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qui formaient de véritables bandes bien armées, détroussaient les passants. Il n'était donc pas encore possible de circuler sans une forte escorte, mais il était visible que tout le monde désirait la paix. On savait également que Behanzin avait envoyé des messagers en Angleterre et en Allemagne où on les avait lestement éconduits.

Le colonel rentra en France pour quelques mois. Le colonel Lambinet, atteint d'une grave maladie, fut aussi rapatrié. Le colonel Dumas, de l'infanterie de marine, arrivant de France, prit l'intérim du commandement supérieur. Il rompit les négociations avec les messagers de Behanzin et prévint celui-ci qu'il exigeait une soumission sans condition ; mais il l'assura cependant que le gouvernement userait envers lui de toute la générosité due à un adversaire qui s'est montré brave. Behanzin refusa.

Quelque temps après, ma compagnie fut désignée pour occuper Godomey, poste nouvellement créé. Nous eûmes une marche très pénible pour nous y rendre, par un chemin dans le sable où les mulets de notre convoi tombaient souvent avec leurs chargements ; il fallait à chaque fois décharger et recharger, ce que les mulets n'acceptaient pas volontiers ; enfin, tout le parcours se fit sous une chaleur accablante et sans arrêt. Néanmoins, personne ne resta en arrière.

Le lendemain de notre arrivée à Godomey, il fallut immédiatement se mettre au travail et construire des cases pour nous et nos officiers. Les uns allaient couper du bois dans la forêt, d'autres ramassaient de la mousse. D'autres encore fabriquaient du mortier avec de la terre et de la paille hachée. Tout le monde y alla de bon cœur, et, en quelques jours, les cases sortirent de terre. On procéda ensuite au nettoyage du village afin d'éviter une épidémie. Après quoi, nous fîmes des reconnaissances dans tous les sens. Partout les populations nous accueillaient avec confiance, les chefs de village venaient au-devant de nous, accompagnés