Page:Leopardi - La Poésie, trad. Lacaussade, 1889.djvu/256

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Qui vient, serpent de feu déroulant ses vertèbres,
Sillonnant les rocs noirs d’une ardente rougeur
Dont la clarté sinistre empourpre la colline
De Capri, Procida, Naple et la Mergelline.
S’il le voit approcher de son modeste champ,
S’il entend l’eau bouillir dans son puits domestique,
Il réveille les siens en hâte et, sur-le-champ,
Emportant ce qu’il peut, il fuit son toit rustique ;
Il fuit et voit de loin, sans abri désormais,
Son doux nid familier et sa vigne chérie
Sous les vagues de feu que le volcan charrie,
Comme un dernier espoir disparaître à jamais !
 
Après tant de silence et d’oubli sous la terre,
La morte Pompéi de sa nuit séculaire
Sort et remonte au jour. Ses monuments épars,
Squelettes du passé, gisent de toutes parts.
Et du forum désert, à travers les arcades,
Entre les fûts tronqués des hautes colonnades,
Les pieds sur le passé, le voyageur errant
Peut contempler au loin, dans le ciel transparent,
L’inextinguible mont dont la crête fumante
Menace encor la plage, — éternelle épouvante !
Et dans l’horreur des nuits, sur les pans écroulés
Des théâtres déserts, des temples mutilés,
À travers cet amas de maisons renversées,
D’un monde disparu ruines entassées,
Où s’abrite l’orfraie, où la chauve-souris,
Fuyant l’éclat du jour, vient cacher ses petits,