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Page:Lepelletier - Émile Zola, 1908.djvu/405

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néo-religieux à notre époque ; il a voulu peindre, dans un panorama superbe, tentant sa verve lyrique et sa virtuosité descriptive, la prosternation naïve et touchante, en son irrémédiable confiance, en somme excusable, des malheureux éperdus de souffrances, qui cherchent partout la cure implorée, qui veulent croire parce qu’ils veulent guérir, et qui se plongeraient dans la piscine du diable, s’ils la rencontraient, si on les y conduisait, comme à celle du dieu de Lourdes, et s’ils espéraient en sortir valides et sains. Un public énorme, sans cesse renouvelé, compose la clientèle annuelle de Lourdes. Zola a rendu, avec une vérité empoignante, la cohue priante et maladive, bondant les trains, encombrant les gares, s’entassant dans les wagons, où les cantiques couvrent le râle des agonisants. J’ai vérifié par moi-même, au buffet d’Angoulême, halte indiquée dans le volume, la scrupuleuse exactitude de la photographie de Zola ; rien n’y manquait. Tous les personnages étaient à leur place, dans leur attitude vraie, depuis les jeunes clubmen, ambulanciers volontaires, jusqu’à la dame riche, présidant le convoi, et pour qui, lorsque tout le contingent pèlerinard est casé, emballé, bouclé, on sert, dans une petite salle du buffet, un modeste déjeuner, qu’elle avale en hâte ; tandis que le chef de gare poliment l’avertit que le train, dès qu’elle sera prête, se remettra en route. Avec la même intensité de vision, Zola s’est penché sur la piscine qui rappelle le cuvier de Béthanie. Il a subodoré et humé, avec un flair connaisseur et patient, les buées nauséabondes qui en montaient. On sait que les pestilences sont par lui respirées de près, et même analysées, —se souvenir du bouquet des fromages du Ventre de Paris, —avec un certain plaisir pervers. On jurerait qu’il