Page:Lepelletier - Histoire de la Commune de 1871, volume 3.djvu/75

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plus qu’une cité insurgée, qu’il serait facile de maintenir isolée. Paris deviendrait comme un lazaret, la contagion révolutionnaire ne pourrait se propager au dehors. Paris alors, faute de secours, serait inévitablement destiné à capituler ou à être pris de vive force. Il fallait donc circonscrire le foyer de la rébellion, empêcher l’incendie révolutionnaire de gagner les départements. Il était urgent que la province n’adhérât point, même en paroles ou par des manifestations trop vives, au mouvement parisien, et que cette adhésion, si elle se produisait sur certains points, fût si faible, si particularisée, qu’on pût aisément la tenir pour nulle et rapidement la comprimer. Habilement, M. Thiers, dès le second jour, à peine remis de son alerte du quai d’Orsay, satisfais de son évasion réussie, se trouvant rassuré à Versailles, au moins provisoirement, s’efforça de parler à la province, de l’amadouer et de la paralyser. Il s’agissait avant tout de détourner les corps élus, les groupes militants d’entrer en rapports avec les insurgés parisiens, qu’il dépeignit aussitôt comme des rebelles sans importance, déjà châtiés ou près de l’être. Il agit, de l’hôtel de la préfecture de Seine-et-Oise, comme s’il eût été toujours maître du pouvoir central, installé au quai d’Orsay ou à l’Élysée.

Il appuya son dire de dépêches mensongères, annonçant qu’il avait 40,000 hommes sous la main, qu’il était à la veille de rentrer avec cette force dans Paris pour y rétablir l’ordre. Il affirmait en même temps que la majorité de la population désapprouvait le mouvement, qu’on devait le considérer comme une simple émeute dont le gouvernement aurait facilement raison. La poste, le télégraphe, dont ses agents conservaient la direction et aussi la manipulation, ne transmettaient que des renseignements erronés, rédigés à Versailles, et surtout des nouvelles fausses de la capitale, que des agents restés à Paris expédiaient. On crut dans les