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PLAISIRS RUSTIQUES

dépassé Paris du côté du Sud, sauf pour une cure à Aix-les-Bains et lors de ce voyage à Montpellier qu’il fit tout enfant, et dont il ne pouvait avoir conservé aucun souvenir. Il est mort sans connaître l’Italie et l’Espagne.

Il avait cependant une grande admiration pour la littérature castillane. Calderon de la Barca était placé par lui à côté, presque au-dessus de Shakespeare, Son goût fort vif pour la langue espagnole demeura toutefois platonique.

Il voulut apprendre, tout seul, l’espagnol. Il m’écrivait, le 10 septembre 1864, pour me demander de lui prêter « mon dictionnaire espagnol ».

Je ne crois pas qu’il ait fait alors de sérieux progrès dans la langue de Cervantès, et je sais que, par la suite, il oublia tout ce qu’il avait pu en apprendre. Il voulut traduire un des drames de Calderon : À outrage secret, vengeance secrète ! Ce projet ne fut pas réalisé. J’apprenais moi-même l’espagnol, à cette époque, et je ne me souviens pas que Verlaine ait jamais conversé avec moi en cette langue, ni qu’il m’ait même questionné sur cet idiome sonore et assez difficile à l’oreille, pour les Français septentrionaux. Tout paraît s’être borné, dans son accès d’hispaniolâtrie, à l’admiration justifiée et réitérée pour l’auteur du Médecin de son honneur, et à l’emprunt de mon dictionnaire espagnol, auquel j’adjoignis le Sobrino, grammaire de la langue castillane.

Plus longtemps que l’amour de l’Espagne et que le désir de savoir l’espagnol, Verlaine conserva ses goûts champêtres. Dans les dernières années de sa vie, il ne parut pouvoir les satisfaire autrement qu’en choisissant, de préférence à tout autre asile, l’hôpital Tenon, campé au sommet de Belleville, dans le voisinage des fortifica-