collets, tabliers même, tout y était ; et quoique la simplicité qui régnait dans toute la maison, eût aussi présidé au choix de ces articles, la qualité et la texture en étaient irréprochables. Comme aussi l’exquise simplicité qu’on remarquait partout, la scrupuleuse ponctualité et le soin avec lesquels les repas étaient toujours servis, tout s’accordait parfaitement avec le caractère de Rose. Le riche damas, le brillant cristal, la vieille porcelaine, tout était digne de recevoir les bonnes choses qu’on leur donnait souvent à contenir ; car madame de Rochon, quoique rigide observatrice des abstinences prescrites par l’Église, ne poussait jamais l’ascétisme plus loin que ne le commandait la loi, et sa table était servie d’une manière que peu d’épicuriens auraient dédaignée. Le soir, Rose faisait la prière à haute voix, dans le salon d’entrée ; et les domestiques, toujours mis avec la simplicité qui distinguait leur maîtresse, y assistaient avec recueillement.
La vie que notre jeune amie commençait à mener, était vraiment pour elle pleine de charmes. Quelques heures de loisir lui étaient accordées tous les matins, et d’après l’avis de madame de Rochon, elle les passait dans la bibliothèque, nourrissant son esprit des chefs-d’œuvre anciens et modernes, rangés sur les rayons.
Aucune jeune fille amatrice du romanesque et d’un vain pathétique ; aucun jeune homme admirateur de l’audacieuse immoralité de l’école de Sue et de Balzac n’y aurait rencontré un seul volume de son goût : mais les ouvrages d’hommes tels que Fénelon, Racine, etc., qui ont employé leur génie à l’instruction de leurs semblables, et à la gloire de Celui qui le leur avait donné, étaient là à profusion, indiquant quel était l’esprit et le cœur de celle qui les avait choisis.
Quelques jours après son arrivée, Rose lisait à haute voix à sa bienfaitrice dans le petit salon, qu’elles avaient coutume d’occuper, quand le frôlement subit d’une robe de soie dans le passage, suivi d’une toux légère et affectée, annonça l’arrivée d’une dame. Un instant après, une jeune personne de vingt ans élégamment mise entra dans l’appartement et se laissa tomber sur un sofa avec un soupir langoureux, comme si l’effort de monter les escaliers était presque au-dessus de ses forces.