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BALAOO

avait de petits événements qui tenaient de la sorcellerie. Malgré portes et serrures, certains objets, les uns légers et futiles et sans aucune valeur apparente, les autres d’un poids considérable, disparaissaient comme par enchantement. Un matin, en ouvrant les yeux, le bon docteur Honorât n’avait plus trouvé, dans sa chambre, sa commode ni sa table de nuit. Il est vrai qu’il dormait la fenêtre ouverte. Il ne porta pas plainte et garda pour lui son ahurissement, se contentant de faire part de l’étrange phénomène à son ami, M. Jules, qui lui conseilla de fermer sa fenêtre pour dormir.

Enfin, on n’osait plus traverser la forêt où il se passait des choses « que l’on ne savait pas »… Ceux qui en étaient revenus de ces choses-là ne se vantaient de rien, mais ne se risquaient plus jamais de ce côté… c’est ce qu’on appelait « le mystère des Bois-Noirs ! »

Tant d’épreuves ne suffisaient-elles point ? Quelle nouvelle épouvante faisait donc courir, ce soir, dans le couloir ordinairement désert de la rue Neuve, les pauvres gens du pays de Cerdogne ?

Une chose en apparence bien banale, un accident de chemin de fer ou, pour mieux dire, un attentat à la vie des voyageurs sur la petite voie d’intérêt local qui rejoint la ligne de Belle-Étable à celle de Moulins, aux confins du Bourbonnais, était la cause de tout ce bruit.

Une main criminelle avait arraché les rails à la sortie du tunnel qui débouche sur la Cerdogne et, si le convoi, qui devait traverser l’eau sur un pont en réparation, n’était arrivé à cet endroit avec une vitesse très ralentie, la catastrophe eût été inévitable. Heureusement, on en était quitte pour la peur. Le fourgon seul avait été démoli. Quant aux voyageurs — une