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BALAOO

longtemps, on avait cherché, à l’auberge du Soleil Noir, un admirable carton où une jeune et jolie femme, court vêtue, dégustait, le petit doigt en l’air, un byrrh doré. Ce carton, qui ornait autrefois le mur de la salle à manger d’été des Roubion, faisait maintenant partie de la galerie de tableaux du seigneur Balaoo, dans sa maison de campagne du Grand Hêtre de Pierrefeu.

Le général Captain était attaché à ce palais, en qualité de concierge, par une patte. Son rôle ne consistait point seulement à nettoyer d’un bec habile tout l’établissement, pendant les absences de son maître, mais encore à introduire les visiteurs et à les faire attendre, en leur offrant des faînes. Car Balaoo recevait, quand il était de bonne humeur, ses amis de la haute et basse futaie. Pour ceux qui avaient le derrière lourd, il avait imaginé un système de petites coches à même le tronc, formant escalier. L’idée lui en était venue en regardant le perchoir de général Captain, chez Mlle Franchet. Balaoo, qui n’avait jamais vu d’ascenseur, était très fier de cet ouvrage qui permettait à son ami Dhol lui-même, qui n’avait jamais quitté la terre, de se promener dans son arbre comme chez lui et de se donner (ce qui était d’ailleurs parfaitement ridicule pour un loup), des airs de jaguar.

Balaoo avait donc fait de la lumière. Il déroula aussitôt, devant le général Captain, « médusé », les splendeurs de la robe de l’Impératrice. Puis, l’ayant secouée, comme on lui avait appris à secouer les étoffes, aux fins d’enlever les plis, il l’accrocha à un clou. Ceci fait, il s’étendit, rêveur, sur sa natte, l’esprit tout brouillé des événements du jour.

Il aurait bien voulu la paix ; mais général Captain ne cessait de lui poser des questions auxquelles, du reste, il ne répondait pas.