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BALAOO

Là-bas, un soupir au pied de l’arbre, un tremblement, de la peur accroupie.

— Oui, mon vieux, grinche Hubert au docteur, qu’elle ne soit pas revenue dans une heure… ton compte est bon, va !…

Paroles inintelligibles au pied de l’arbre, balbutiement, gâtisme, membres glacés.

— Qu’est-ce que tu dis ? On ne t’entend pas, docteur, parle donc distinctement !

— Ah ! ricane Siméon, sinistre, il parlait mieux en Cour d’Assises !

— C’est moins que rien ! Les autres n’en voudront même pas pour nous racheter ! fait Hubert.

— Sûr qu’il faudrait mieux tenir le Président de la République ! imagine tout haut Siméon, le plus inventif des trois.

— Oh ! ils n’oseront point nous toucher, maintenant que nous sommes dehors avec les papiers de l’État !… réplique Élie.

— Bah ! un député, c’est pas l’État ! explique, avec une lippe méprisante, Élie… C’est point encore parce que celui-là nous doit sa situation que la République prononcera notre divorce d’avec la Veuve !

Hubert dit : « La Vache ! il n’aurait jamais passé sans nous au ballottage ! »

Et tous trois, repris par le souvenir des élections, se mirent à parler bulletins et listes, et comités, comme des greffiers de mairie.

Le docteur, au pied de l’arbre, son fil à la patte, n’en « revient pas » ! Au fond de cette forêt, ces trois bêtes sauvages qui escomptent les chances d’un candidat à la prochaine législature et font, à l’avance, le tranquille