Page:Leroux - Balaoo, 1912.djvu/354

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
334
BALAOO

Traqué sur les toits de l’hotel de ville, par les journalistes, les pompiers, les employés de bureau, et aussi par les agents des brigades centrales requis à cause de leur force bien connue, de leur poitrine large et de leurs poings solides (ceux-ci avaient reçu mission d’essayer de capturer le monstre vivant), on avait pu croire un moment qu’on le tenait.

De fait, la course avait été menée avec un entrain qui tenait de la rage et du désespoir. De mansarde en mansarde, de cheminée en cheminée, on l’avait fait reculer jusque sur le toit d’un petit pavillon, en face de la caserne Lobeau.

Les agents des brigades centrales, les uns munis de filets et les autres de lassos, sorte de nœud coulant dont ils paraissaient fort embarrassés, étaient prêts à se jeter sur lui, quand on amena sur la gouttière le professeur Coriolis lui-même, qui constata que, malgré l’horreur de cette lutte tragique, le monstre avait conservé un peu de ce vernis de civilisation qu’il avait eu tant de mal à lui inculquer. L’anthropopithèque, en effet, lui apparut, une seconde, entre deux cheminées (bondissant de l’une à l’autre), le monocle à l’œil !

— Balaoo !… Balaoo !… cria-t-il, d’une voix tendre et désolée où il y avait moins de colère et de reproches que de désespoir qui demandait à être consolé !… Balaoo !…

Mais, à cette voix, à ce cri, au lieu de répondre à celui qui l’appelait, l’Autre sembla retrouver une nouvelle énergie. La peur qui, tout à l’heure, l’avait fait fuir, se tourna en rage et, fonçant comme un bolide sur un groupe d’agents et de quelques employés de bureau (ces derniers, à tout hasard, s’étaient armés de leur couteau à papier),