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BALAOO

à Gertrude. Il y a des jours où il nous fait rire comme des folles.

— Tant mieux ! mais moi je l’ai toujours vu triste à pleurer…

— Quand il y a du monde, il est comme ça. Il est timide…

Ils étaient arrivés à la porte du verger. Noël, qui paraissait de plus en plus affligé, la leur tenait ouverte, bien humblement. Ils passèrent.

— Il n’a pas embelli ! dit Patrice à Madeleine.

— Oh ! fit vivement Madeleine, tu le trouves laid ? As-tu regardé ses yeux ? J’en ai rarement vu d’aussi intelligents.

— C’est vrai ! acquiesça Patrice, peu contrariant.

Coriolis était devant eux, sur la porte de la serre. Il n’avait pas l’air enchanté…

— Je vous ai fait appeler par Noël, dit le vieux Coriolis en fronçant le sourcil (geste qui lui était habituel et qui n’effrayait plus que Noël) parce que j’ai cru entendre qu’il faisait de l’orage… mais je me suis peut-être trompé… À mon âge, on commence à ne plus être sûr de son oreille…

Patrice l’écoutait, stupéfait du ton sur lequel il parlait de l’orage… ; son étonnement ne connut plus de bornes quand il entendit Coriolis leur demander avec brutalité :

— Enfin !… vous !… vous ne voudriez pas me tromper !… A-t-il tonné, oui ou non ?

— Moi, je n’ai rien entendu, répondit Madeleine avec la plus grande effronterie. Et elle avait fait un geste discret vers Patrice, pour que celui-ci ne la démentît point. Malheureusement, le jeune homme disait déjà, sans dissimuler son ahurissement :