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Page:Leroux - L’Homme qui revient de loin.djvu/199

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UN SUJET INTÉRESSANT…
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Elle retenait cette pauvre tête, ce pauvre front embrasé contre sa joue et elle le rafraîchissait en vain de ses larmes. Et elle ne douta point qu’il eût complètement perdu la raison. Son mari était fou !…

Elle tenta bien de lui faire comprendre que c’était lui qui avait tiré le coup de revolver contre lui-même pour se débarrasser de l’atroce pensée du crime qui pesait trop douloureusement à son cerveau, et peut-être aussi de la vision du fantôme qui le poursuivait, image inventée par son remords, mais il jura sur le Christ qu’il n’avait pas voulu se tuer et que c’était André lui-même qui l’avait tué !… « Il y a des circonstances où les morts peuvent toucher, soulever, remuer des objets comme les vivants… c’est connu ; c’est connu, même chez les vivants !… La science ne le nie plus !… William Crookes, avec ses morts, en a fait bien d’autres ! »

Ayant dit cela, sa tête s’appesantit et il s’endormit dans ses bras. Fanny resta ainsi plus d’une heure, sans bouger. Elle n’avait jamais aimé autant cet homme que depuis qu’il endurait de tels supplices dont elle était la cause première.

C’est pour elle qu’il avait tué. C’est à cause d’elle que les tenailles du remords lui déchiraient le cœur et le cerveau.

Mais elle le guérirait ; oui, elle le guérirait par la fuite et par l’amour… Ils s’aimeraient sous des cieux de joie et de lumière que ne fréquentent point les fantômes du Nord.

Elle le sauverait de la torture psychologique