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M. LONGUET SUBIT LA TORTURE

torture de Cartouche. Ce furent là de bien affreuses minutes Je regardais M. Éliphas de la Nox qui, lorsque ce second sinistre hurlement se fut tu, dit encore :

D. Pourquoi cries-tu ainsi, Cartouche ?

R. Je vous répète que c’est à cause que ces imbéciles ne me prennent point les noms que j’ai sur le bout de la langue ! Ce n’est pas de ma faute si Cartouche n’a pas dénoncé !

D. Mais Cartouche n’a pas crié ; pourquoi cries-tu, Cartouche ?

R. C’est Cartouche que l’on torture et c’est Théophraste Longuet qui crie !

M. de la Nox semble foudroyé par cette dernière réponse. Il se tourne vers M. Lecamus et Mme  Longuet. Il dit d’une voix basse et tremblante :

— Alors, alors, alors, c’est lui qui souffre.

Et c’était la vérité. « On ne pouvait, dit M. Lecamus, en douter à l’expression effroyable du visage dans le moment que le bourreau enfonçait le coin. C’était Cartouche que l’on torturait et c’était Théophraste qui souffrait. Ceci prouvait l’identité de l’âme ; mais que la douleur n’eût pas cessé d’être effective, après deux cents ans, voilà ce qui consternait M. Éliphas de la Nox. C’était la première fois qu’un cas semblable se présentait sous son scalpel astral. La douleur de Cartouche criait, à travers deux siècles, et ce cri de la douleur qui n’était pas sorti de la bouche de Cartouche avait attendu, pour sortir, la bouche de Théophraste. »

M. Éliphas de la Nox se mit la tête dans les mains, sa lumineuse tête, et il pria, dit M. Lecamus. Il pria ardemment. Puis il se retourna encore vers nous :

— Nous n’en sommes, dit-il, qu’au second coin. Et il y en eut sept !…

— Il en reste encore cinq, fit Marceline, qui avait