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Page:Leroux - La Machine à assassiner.djvu/174

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GASTON LEROUX

M. de Beigneville, je n’ai pas entendu un mot sortir de sa bouche !

— Il est muet ! prononça Jacques Cotentin.

— Ah ! le pauvre monsieur ! nous comprenons maintenant pourquoi sa sœur ne le quitte pas ! Es-tu convaincue, maintenant ? demandèrent Mlles Élise et Florise à Mlle Denise.

— Il le faut bien ! leur accorda avec une moue souriante Mlle Denise. Il le faut bien, puisque monsieur, qui les connaît, m’affirme que j’ai tort !… N’importe ! Permettez-moi de le regretter… parce que c’était bien joli !…

— Il faut pardonner à notre sœur, firent Mlles Florise et Élise, elle est un peu romantique !…

— Tenez ! s’écria Mlle Denise, les voici qui passent !… Dites-moi s’ils n’ont pas l’air de deux amoureux !…

Jacques, à qui l’on venait de servir un bouillon chaud et qui déjà y trempait ses lèvres, posa là son bol et courut à la vitre, contre laquelle il appuya son front… C’étaient bien eux !… et c’était vrai, hélas ! qu’ils avaient bien l’air de ce que disait Mlle Denise…

Ils étaient habillés tous deux de tricots de laine blanche… Les cheveux dorés de Christine, sous sa toque trop petite pour les retenir, lui faisaient une auréole joyeuse… Lui passait grave et beau, son visage de mystère à demi enfermé dans le cadre hermétique du passe-montagne… Elle lui serrait tendrement le bras et ils croisaient leurs regards qui se disaient tant de choses, à défaut de leurs lèvres muettes…

Denise était restée en extase ; Mlles Florise et Élise proposaient déjà au voyageur de faire prévenir le couple !

— Non ! non ! ne les dérangez pas ! fit Jacques brusquement en se retournant.

Et il était si pâle !… si pâle !…