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Page:Leroux - La Machine à assassiner.djvu/76

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GASTON LEROUX

Ces événements avaient jeté, comme on le pense bien, dans un désarroi complet la police et le parquet… De tels faits ne tendaient à rien moins qu’à établir l’innocence d’un homme que l’on venait de guillotiner !… Les premières enquêtes avaient été conduites dans le plus grand mystère, mais le secret dont on voulait les entourer ne résista pas à la rumeur grandissante et surtout à la vague de terreur qui submergea à nouveau toute la contrée environnante… Les reporters, depuis quarante-huit heures, s’étaient mis à la besogne. Pendant que les uns parcouraient le pays, les autres assiégeaient les bureaux de la Sûreté générale. Et la terrible nouvelle — terrible pour la justice — éclatait comme une bombe : Bénédict Masson était innocent !…

Ah ! la justice et la police allaient passer de mauvais jours ! Un reporter du journal l’Époque parvint à interviewer le garde des sceaux, qui ne put se dérober aux questions pressantes que lui posait, par la bouche de ce journaliste, l’opinion publique. Et il fournit le dernier argument que lui avait soufflé une police aux abois.

Sans aucun doute, des crimes avaient été commis depuis l’exécution de Bénédict Masson, qui rappelaient singulièrement la mort tragique du père Violette, mais en admettant même que Bénédict Masson fût innocent de ce crime-là, il n’en restait pas moins coupable de l’assassinat de la petite Annie, sur laquelle on n’avait pas relevé les traces « du genre d’assassinat » pratiqué pour les autres. À quoi le reporter avait répliqué qu’on n’avait rien relevé sur la petite Annie et que cet argument péchait en cela même par sa base. Le garde des sceaux n’avait pu ajouter qu’une chose, c’est que le témoignage de Christine Norbert ne laissait rien à désirer quant à la culpabilité de Bénédict Masson !…

Ce ne fut point l’avis de l’opinion publique qui est toujours simpliste et qui se résuma ainsi : « On avait guillotiné Bénédict Masson pour des crimes qui conti-