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Page:Leroux - La Poupée sanglante, 1924.djvu/110

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LA POUPÉE SANGLANTE

droite, semblait brûler d’un feu d’enfer ; à côté de là, près d’une table où, sur une nappe blanche s’étalaient des débris d’humanité, l’homme trapu se tenait, un tablier aux reins, la poitrine quasi nue, les bras retroussés jusqu’au coude, des bras rouges comme s’ils avaient plongé dans des entrailles sanglantes.

Le prosecteur était penché sur le fourneau, faisant rougir des tenailles dont il examinait, de temps à autre, les pinces incandescentes.

Le père Norbert et Christine, plus près de la fenêtre, étaient penchés de chaque côté d’une table d’opération que j’apercevais en raccourci et sur laquelle était étendu Gabriel dont je ne voyais bien que le front et les yeux clos surélevés de mon côté.

Le reste du visage disparaissait vaguement sous des linges, sous une accumulation blanchâtre qui lui cachait le nez et la bouche ; quant au corps, Norbert et Christine me le cachaient et ce n’est que bien imparfaitement que j’assistai, de mon petit observatoire, à une intervention chirurgicale qui devait être tout à fait exceptionnelle…

Je répète tout à fait exceptionnelle car, bien que, de toute évidence, Gabriel fût endormi, cela n’empêcha point le patient, à diverses reprises, de se soulever à demi dans une espèce de bondissement désordonné et farouche pour retomber presque aussitôt entre l’horloger et sa fille qui lui tenaient les mains et les bras et le rétablissaient dans sa position première.

Par trois fois les pinces incandescentes avaient accompli leur office !

Quel office ?

Il ne s’agissait point là simplement des « pointes de feu », ni même de quelque Chose d’approchant, comme l’on pense bien.