Aller au contenu

Page:Leroux - La Poupée sanglante, 1924.djvu/211

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
208
LA POUPÉE SANGLANTE

ront le séjour de la Touraine, climat doux, tempéré, qui me remettra de mes dernières émotions. Nul ne s’étonnera de mon absence et les magistrats ne pourront s’y opposer. Du reste, l’enquête est bien près d’être terminée. On ne retrouve pas les six autres victimes parce qu’il en a fait de la fumée ! Ah ! le bandit ! Quand je pense qu’il me dédiait des vers… et qu’il pleurait sur ma main ! Tu viens, Jacques ?

— Tu sais bien que je fais tout ce que tu veux ! et puis, tu as raison… notre présence peut être utile là-bas !

— Que le ciel t’entende ! Hélas ! elle nous écrit : « Adieu, c’est fini ! »

— Ça n’est jamais fini, Christine, tant qu’on peut l’écrire.

— Eh bien ! préviens mon père. Gabriel ne souffrira pas de ton départ ?

— Non !… maintenant, je puis m’absenter… m’absenter même longtemps… pourvu que ton père reste et veille !…

— Oh ! il ne le quitte pas !… Tu n’as pas remarqué qu’il l’a à peine quitté pour venir me voir… de temps en temps… et vite !… Aucun être au monde n’aura été soigné comme Gabriel !… Pauvre cher papa !… Gabriel, c’est un peu sa vie… c’est aussi la tienne, Jacques !

— Non, la mienne, c’est toi, Christine.

— Eh bien ! en route ! fuyons ce quartier, cette île où il me semble entendre encore le misérable rôder autour de moi… avec son sourire si affreusement mélancolique… et ses vers… ses vers qu’il chuchotait sur un ton liturgique ! « Pour l’amour de Dieu, ne remue pas les sourcils quand tu passes près de moi, que ton regard reste glacé dans son lac immobile… » etc…, etc…, et autres du même acabit qui me remplissaient d’aise sous