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Page:Leroux - La Poupée sanglante, 1924.djvu/228

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LA POUPÉE SANGLANTE

avec une hâte que Jacques ne pouvait s’expliquer, l’escalier aux larges dalles de marbre usé, à la rampe de fer forgé, descellée par endroits, et qui n’avait peut-être pas été réparée depuis l’autre Coulteray… Louis-Jean-Marie-Chrysostome…

Arrivée au premier étage, elle se dirigea comme guidée par un sûr instinct vers une grande porte à double battant qu’elle ouvrit. L’odeur spéciale des chambres mortuaires les saisit tout de suite…

C’était la fameuse chambre de Diane de Poitiers. Sur une estrade, le grand lit aux piliers torses était encore jonché de fleurs… Aux quatre coins de l’estrade, les cierges à peine éteints exhalaient encore leur funèbre parfum…

Elle alla à la fenêtre, l’ouvrit d’un geste large, repoussa les persiennes et le jour entra à flots.

Elle regarda tout de suite les murs tendus de tapisseries de Flandre de haute lice représentant des sujets tirés des romans de chevalerie.

Avec une stupéfaction grandissante, Jacques vit Christine s’intéresser méticuleusement à ces figures qui faisaient revivre les hauts faits des chevaliers de la Table ronde. Elle passait de l’un à l’autre après un examen d’une minutie exaspérante… Tantôt elle se baissait, tantôt elle se dressait sur la pointe des pieds, tantôt elle montait sur un tabouret…

Elle se retourna enfin en poussant un soupir et le visage contracté. Elle regardait Jacques, mais apparemment sans le voir et certainement sans l’entendre, car, comme il s’était risqué à lui poser une question qui éclairât ce manège pour lui tout à fait incompréhensible, elle passa près de lui sans lui répondre, et, soudain, comme obéissant à une idée nouvelle, elle sortit de cette chambre, et, par le corridor, entra dans la pièce adjacente.