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Page:Leroux - La maison des juges.djvu/50

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De Faber. — Et aussi du soir ?… Avez-vous lu les journaux du soir ? Vraiment, votre calme me stupéfie… Jean est-il là ?… J’espère que vous allez poursuivre… (Il déploie le journal. Lisant : ) : « Le crime de la maison des juges. » Depuis dix minutes, on hurle ça sur le boulevard du Palais… C’est gai de recevoir ça dans le nez, en sortant de l’audience. Nous avons tous l’air d’être compromis… « Le crime de la maison des juges ! » Vous allez poursuivre, hein ?

Le Président, se décidant à prendre le journal, s’asseyant et lisant. — …Ah ! c’est le Peuple, un journal révolutionnaire…

De Faber, se promenant fébrilement pendant que le président lit. — Un journal révolutionnaire !… Un journal révolutionnaire !… Si vous n’aviez pas permis aux journaux modérés de reproduire les déclarations insensées de Tiphaine contre votre maison, il ne se serait pas trouvé de journaux révolutionnaires pour y ajouter foi… Avec ça qu’ils prétendent maintenant que les preuves existent…

Le Président. — Les preuves de quoi ?

De Faber, agacé et criant. — … Du crime de la Maison des juges !… Lisez donc, là… (Il récite.)… « En fouillant dans les archives… »

Le Président, froissant le journal. — C’est trop bête…

De Faber. — Vous allez poursuivre…

Le Président. — Mais laissez-moi donc. Je ne peux pas empêcher ces imbéciles d’écrire l’histoire de France à leur manière.

De Faber. — Si ! Vous devez les en empêcher ! Pour l’avenir comme pour le passé, il ne faut pas qu’il y ait de doute sur la culpabilité de Tiphaine. Que vous permettiez qu’on écrive le contraire, cela dépasse toute imagination !

Le Président. — Je ne permets rien. Je ne m’en occupe pas. J’estime que toutes ces déclamations anarchiques n’ont aucune importance. J’ajouterai, mon cher Faber, que je vous trouve étrange d’être plus excité que moi… Il ne s’agit pas de vous ?

De Faber. — Je vous demande pardon !… Il s’agit de moi… Il s’agit de nous tous. La manœuvre crève les yeux. Au lendemain du jour où nous avons tous décidé au Palais de fêter solennellement le centenaire de l’ancêtre, de notre ancêtre à tous, vous entendez, de notre chef, de celui que nous considé-