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LE CHÂTEAU NOIR

dont la figure n’était pas plus recommandable, avaient bien pu se déguiser en officiers bulgares… et ainsi s’expliquerait la facilité avec laquelle ils avaient pu approcher des sentinelles, les supprimer et pénétrer dans la demeure du général Vilitchkov et d’Ivana. Pour quelle abominable entreprise ? Déjà le jeune homme s’était heurté à deux cadavres. Qu’étaient devenus Vilitchkov et Ivana ?

Avaient-ils été déjà victimes des misérables ?

Le reporter ne le pensa point, devant la fureur croissante et le désarroi très apparent des conjurés. S’il avait pu douter encore un instant de la véritable personnalité des officiers qui se disputaient devant lui en ouvrant des portes et en agitant leurs armes, il ne tarda point à être complètement renseigné par un nom qui fut prononcé et dont les syllabes sonores lui étaient restées dans l’oreille depuis sa conversation avec Ivana. « Stefo !… Stefo, le Dalmate, avait-elle dit, l’âme damnée de Gaulow ! »

C’était donc la bande de Gaulow qui était là, accomplissant son horrible besogne, achevant l’effroyable vengeance commencée dix-huit ans plus tôt.

Et ces paroles de sanglant reproche que celui d’entre eux qui paraît le chef adresse à Stefo, si Rouletabille ne peut exactement les comprendre, du moins espère-t-il en saisir le sens. Le nom d’Ivana revient à plusieurs reprises dans la bouche de l’homme, de cet homme à la figure terrible, apparue une seconde, dans la clarté lunaire, et qui pourrait bien être la figure de Gaulow elle-même !…

Évidemment, cet homme se plaint de ce qu’on n’a pas trouvé Ivana… et les autres répliquent qu’ils l’ont cherchée partout. Cela se comprend à leurs gestes…

Ivana est cachée, bien cachée dans cette mystérieuse demeure que Rouletabille, quelques heures auparavant, comparait lui-même à une boîte à surprise. Vivante et cachée ! Du moins Rouletabille l’espère. Sans quoi, il n’y