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Page:Leroux - Le Château noir, 1933, Partie 2.djvu/142

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LE CHÂTEAU NOIR

— Ma foi, non, monsieur ! La cuirasse est à moi, je ne vous la prêterai pas !…

— Et pourquoi cela ?

— Parce qu’elle est trop dangereuse…

— Ah ! ah ! ta cuirasse est dangereuse…

— Oh ! très dangereuse !… Vous comprenez, il faut savoir s’en servir !…

— Tu m’apprendras !… Ne m’as-tu pas raconté qu’elle arrêtait les balles ? C’est le principal !

— Ça, monsieur, pour arrêter les balles, elle arrête les balles !

— Comment alors peut-elle être dangereuse ?…

— Parce que je vais vous dire… Ma cuirasse, comme j’ai eu l’honneur de vous l’expliquer, est formée d’une succession de tissus d’une nature telle qu’ils déchirent au passage l’enveloppe de nickel ou d’acier de la balle, au lieu d’en être déchirés…

— Oui, oui, je me rappelle.

— Et ainsi il y a à l’intérieur même de la cuirasse une sorte d’expansion, si j’ose dire… et même d’écoulement par fusion de la matière plomb… ce qui enlève à la balle toute puissance perforatrice…

— Eh bien alors ?…

— Eh bien alors, voilà où est le danger… Tout ce grand combat entre la balle et les tissus, cet arrêt du projectile, ce déchaussement du nickel et cet épanchement de la matière plomb ne se fait pas sans un certain travail.

— Je le pense bien !…

— En l’occurrence, le travail est d’autant plus considérable que la balle a été lancée avec plus de force et est plus subitement arrêtée dans sa course…

— Je te suis… après ?

— Après, monsieur, c’est bien simple… là où il y a travail, il y a échauffement !

— Ah ! ah ! il y a échauffement ! Je commence à comprendre.