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Page:Leroux - Le Château noir, 1933, Partie 2.djvu/163

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LES DERNIÈRES CARTOUCHES

« Misérables !… leur souffla-t-il. Vous nous avez fait manger le prisonnier !… »

Un formidable éclat de rire accueillit cette explication inattendue d’un déjeuner de gala.

« Ah ! ah ! ah ! elle est bien bonne ! disait La Candeur. Le bifteck au pomak !… Messieurs, je vous propose, pour perpétuer cette minute inoubliable, de fonder le biftek au pomak ! Si jamais nous réchappons de cette aventure, nous nous réunirons au moins une fois l’an pour manger le bifteck au pomak !… et nous écrirons, huit jours auparavant à la Karakoulé pour qu’on nous envoie de la marchandise toute fraiche !… »

Rouletabille, maintenant, riait plus fort que les autres… Il se tourna vers Ivana qui, elle aussi, semblait s’amuser énormément.

« Ma chère Ivana !… je vous en prie… j’en suis malade… Soyez plus charitable que les autres ! dites-moi par quel sortilège…

— Devinez ! dit-elle. Prenez votre bon bout de la raison !

— Je veux bien, dit Rouletabille, je commence : Messieurs, il ne vous restait point de provisions ?

— Aucune ! proclamèrent-ils.

— Vous n’êtes pas sortis de la Karakoulé ?

— Nous n’en sommes pas sortis !…

— Ces provisions étaient donc dans la Karakoulé sans que nous le sachions ?…

— Il brûle ! fit La Candeur.

— Je commence par en haut, dit Rouletabille. À la plate-forme, rien ! Au troisième étage, rien… Au second étage, les Allemands ! Ah ! les Allemands ! Je parie que vous avez trouvé tout cela chez les Allemands…

— Il a gagné !… » dit Vladimir.

Mais Rouletabille bondit et frappa du poing sur la table…

— Malheureux ! Vous les avez assassinés !…

— Non ! pas ça !…