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Page:Leroux - Le Château noir, 1933, Partie 2.djvu/34

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LE CHÂTEAU NOIR

pend au plafond et descend gracieusement jusque sur le plancher. Ce dais était parsemé d’étoiles d’or et surmonté d’une guirlande de fleurs qui descendait jusqu’en bas en forme de festons. C’est dans cette niche féerique que s’assied la jeune fiancée pour recevoir les hommages et les félicitations des dames.

Kara Selim conduisit lui-même Ivana sous le dais et la fit asseoir. Il n’eut garde de lever son voile, mais il lui prit une main entre les siennes et s’étonna de la trouver glacée. Il lui demanda si elle avait peur de lui. Ivana, pour toute réponse, secoua la tête.

« N’oubliez point, Ivana, ajouta-t-il d’un certain air où elle vit de la menace, et, ce qui lui parut plus grave, de la raillerie, n’oubliez point que vous m’avez promis de m’aimer !…

— Et vous, murmura la jeune fille, ne m’avez-vous point promis quelque chose ? »

Gaulow sourit comme il savait sourire :

« Ah ! ah ! fit-il, vous pensez encore au coffret byzantin ?


— Je vous ai dit, Kara Selim, combien je tenais à ce coffret, et qu’il est plein pour moi des plus précieux souvenirs, des médailles, des bijoux, que je considère comme des fétiches, et que l’on m’a fait regarder comme tels depuis ma plus tendre enfance ; comment pouvez-vous vous étonner que j’y tienne, et que, surtout dans un jour comme celui-ci, je veuille les toucher ?…

— Vous les toucherez, vous les toucherez, Ivana, promit Kara Selim, de sa voix la plus douce ; mais comprenez que je ne pouvais faire apporter dans la chambre nuptiale un meuble qui y serait en ce moment déplacé. Regardez cette chambre, et remarquez que, selon l’usage, vous n’y voyez ni chaise, ni sofa, ni coffre d’aucune sorte, rien en dehors de l’aski. C’est la coutume qui le veut ainsi[1]. Ce soir, vous trouverez tout le mobilier dont

  1. Trente ans dans les harems d’Orient.