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Page:Leroux - Le Château noir, 1933, Partie 2.djvu/96

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LE CHÂTEAU NOIR

hauteur de la corniche, sur la campagne rocheuse, et, de l’autre, approximativement, sur les jardins d’hiver du harem.

C’est ce qui lui avait inspiré l’idée, quand le chemin des toits lui eut été interdit après la fuite et les révélations de M. Priski, de pénétrer dans le harem, en usant de la fenêtre du cachot souterrain, qui prenait jour extérieurement, lui aussi, au-dessus de la corniche.

Cette corniche était formée, comme nous l’avons dit, par les rochers surplombant le torrent, les murs de la Karakoulé ayant dû être édifiés légèrement en retrait, à cause de cette voussure creusée dans le roc par les eaux furieuses du torrent, descendu de l’Istrandja-Dagh.

Ayant contourné la troisième tour du Sud-Ouest, Rouletabille s’était vu alors presque à la hauteur de l’ouverture grillagée donnant sur le haremlik. Événement de plus en plus curieux, le grillage avait été arraché, puis simplement replacé, et Rouletabille n’avait eu qu’à se hisser à la force des poignets, à pousser la grille, et il se trouva dans une embrasure d’où il lui était facile de voir tout ce qui se passait dans cette partie du harem.

Or, il ne s’y passait rien du tout. Il avait devant lui la grande piscine d’hiver, qui servait aux bains des hanoums et qui, à cette heure, était déserte.

Tout le peuple du harem, femmes et eunuques, kadines, odalisques et esclaves se tenait à ce moment dans les jardins, les cours et sur les terrasses, occupé par le feu d’artifice.

S’étant rendu compte de cette heureuse coïncidence, Rouletabille sauta dans une immense pièce luxueusement dallée des pierres les plus rares, où chantaient des jets d’eau retombant en pluie parfumée dans des vasques, suivant une architecture qui n’a pas varié depuis les Mille et une Nuits.

De là, il pénétra dans une sorte de vestiaire où étaient accrochés des voiles et des vêtements de femme, des feradje, des yalmaks qui appartenaient sans doute aux