quand j’ai réussi à envoyer la Babette en courses… alors je prends ma petite guiterne à laquelle j’ai mis les plus vieilles cordes que j’ai pu trouver ! et je joue des airs lointains comme un vrai troubadour… Non, non, je ne suis pas trop malheureux, Monsieur le secrétaire perpétuel !… croyez-moi !… Et puis, il faut que je vous dise : j’ai mon piano !… Alors, je fais tout ce que je veux avec mon piano !… je joue tous les airs que je veux… des airs terribles, des ouvertures tonitruantes, des marches à tous les abîmes !… Ah ! c’est un piano magnifique qui ne dérange point Babette quand elle fait sa vaisselle !…
Là-dessus, Martin Latouche se précipita à un piano et se rua sur les touches, parcourant avec une véritable rage toute l’étendue du clavier. M. Hippolyte Patard s’attendait à la clameur forcenée de l’instrument. Mais, malgré tout le travail que lui faisait subir son maître, il resta muet. C’était un piano muet, qui ne rend par conséquent aucun son, et que l’on fabrique pour ceux qui veulent s’exercer aux gammes sans gêner l’oreille des voisins.
Martin Latouche dit, la tête en arrière, les boucles des cheveux au vent de son inspiration, les yeux au ciel, et les mains bondissantes…