Page:Leroux - Le Parfum de la dame en noir.djvu/46

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faut une demi-heure à peine pour aller en voiture du Tréport à Eu…

— Nous serons restés peu de temps dans ce pays, fis-je.

— Assez, je l’espère… assez pour ce que je suis venu y chercher, hélas !…

Je pensai au parfum de la Dame en noir, et je me tus. Ne m’avait-il point dit que j’allais tout savoir. Il m’emmena sur la jetée. Le vent était encore violent et nous dûmes nous abriter derrière le phare. Il resta un instant songeur et ferma les yeux devant la mer.

— C’est ici, finit-il par dire, que je l’ai vue pour la dernière fois.

Il regarda le banc de pierre.

— Nous nous sommes assis là ; elle m’a serré sur son cœur. J’étais un tout petit enfant ; j’avais neuf ans… Elle m’a dit de rester là sur ce banc, et puis elle s’en est allée et je ne l’ai plus jamais revue… C’était le soir… un doux soir d’été, le soir de la distribution des prix… Oh ! elle n’avait pas assisté à la distribution, mais je savais qu’elle viendrait le soir… un soir plein d’étoiles et si clair que j’ai espéré un instant distinguer son visage. Cependant, elle s’est couverte de son voile en poussant un soupir. Et puis elle est partie. Je ne l’ai plus jamais revue…

— Et vous, mon ami ?