Page:Leroux - Le fils de trois pères, Baudinière, 1926.djvu/365

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Quelques jours après la manifestation que nous venons de relater, deux personnes disparurent ; ce fut d’abord la Paula, dite « Manchotte », parce qu’elle n’avait plus qu’un bras.

La seconde fut la propre sœur du « boïa », la Cioasa, qui n’avait point quitté la Fourca depuis plus de trente ans et qui disparut comme par enchantement.

Enfin il y eut le crime de la rue de la Toussan. On se rappelle que c’est dans cette ruelle obscure, derrière la basilique de Sainte-Hélène, qu’habitait la vieille Bruno, dite « la Boccia ». Cette nuit-là, comme elle reprisait des bas, vers les dix heures, des gémissements se firent entendre dans le haut de la rue, du côté des contreforts qui soutenaient l’antique basilique.

Nous avons dit combien, dans ces nuits de mystère, on vivait calfeutré chez soi. Dès la tombée du soir, chacun fermait ses portes, ses volets, mettait les barres, et, quoi qu’il arrivât, on ne se montrait plus qu’avec le soleil qui faisait fuir tous les fantômes.

Ces gémissements, des voisins les entendirent. C’était comme une voix à l’agonie qui implorait du secours. Personne n’eut garde d’ouvrir. On se rappelait que, la semaine précédente, on avait usé de ce subterfuge à la Costa que, Cauvin dit « Frussa » s’y était laissé prendre. Il avait entr’ouvert son volet, une bande s’était ruée sur lui, l’avait renversé et avait mis sa maison au pillage. Épouvanté par les menaces, il n’avait même pas osé porter plainte et à toutes les questions que la justice lui posa, il répondit obstinément qu’il ne s’était rendu compte de rien tant l’attaque