La « conduite intérieure » nous attendait, nous deux et le sac !
— Où allons-nous donc ?
— Nous promener !…
Une angoisse insupportable commençait à me posséder. Je serrais les dents, je me rappelle cette minute comme une des plus mystérieusement inquiétantes et des plus insupportables qu’il m’ait été donné de vivre. Nous avions quitté la route de Villers pour prendre une allée assez obscure, sous de grands arbres, déjà pleins de nuit et de silence. Nous fîmes le tour d’une propriété dont toutes les issues étaient closes. Arrivés derrière un haut mur, Helena arrêta l’auto et, lestement, sauta à terre. Je ne perdais pas un de ses gestes. Ils n’étaient point pour me rassurer.
Elle examinait, d’un coup d’œil rapide, les champs déserts, jusqu’à la haute futaie, se penchait au-dessus d’une haie, regardait le ciel où glissaient de gros nuages noirs, accourus avec le vent d’Ouest qui venait de s’élever. Puis elle revint à l’auto et me dit :
— Vite ! venez ! la lune va se montrer !
Elle avait une voix de commandement à laquelle on ne résiste pas. Je vous jure que ce n’était pas l’envie qui m’en manquait. Je ne tenais nullement à descendre dans cette solitude, moi !… Et, pourquoi faire ?… Pourquoi faire ?… « Eh bien ? gronda-t-elle… et le sac ?… »
Ah ! oui, le sac ! Automatiquement, ma main descendit sur le sac et, une fois de plus, je la suivis.