Page:Leroux - Sur mon chemin.djvu/157

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
143
AU PIED DES ICONES

avec ses chemises rouges, avec ses tuniques jaunes parmi les murs éclatants de blancheur, à l’ombre des dômes d’or, des toits verts et des bulbes bleus. Imaginez-le sous un soleil torride, dans une atmosphère de poussière qui n’a point vu la pluie depuis quatre mois. Dans cette gamme éblouissante de lumières, faites passer les popes tout noirs, habillés de longs voiles comme des femmes en deuil.

Les hommes s’appuient à de longs bâtons ; les femmes dorment sur des pierres tombales ; d’autres, vaincues par les fatigues, semblent mortes sur les degrés de l’église, où elles sont venues tomber. Les mères découvrent des poitrines décharnées et tentent d’y allaiter leurs enfants. Une grande joie est répandue sur tous les visages. Ils sont arrivés. On va leur ouvrir les portes du sanctuaire, et ils oublient les chemins parcourus, tous, même ceux qui sont venus de très loin, ceux qui ont vu les routes d’Asie et qui traînent à leur souliers d’osier la poudre de deux mondes…

Ils s’abîment enfin au pied des icônes, ils frappent, du front, l’airain qui recouvre le pavé des églises ; ils baisent, pâmés, des livres que leur tendent les popes. Elles femmes écartent les bras comme si on les clouait sur des croix ; elles ouvrent la bouche, qui n’articule aucun son ; elles tournent, tournent, s’abattent dans une crise terrible. On les emporte.

Vous sortez. Sur la place une fontaine de pierre