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SUR MON CHEMIN

tous les huit jours chez le bâtonnier ou chez mon rapporteur, lequel en était aussi las que moi.

— Je ne sais ce qu’ils ont ! s’écriait-il, en parlant ainsi fort irrévérencieusement des membres du conseil… On ne peut plus devoir trois chemises à son chemisier sans qu’ils s’en mêlent !

Et le fait est qu’ils se mêlent de tout, leur police étant admirablement faite. Ils apprirent dernièrement qu’un jeune stagiaire, étant allé plaider en province, avait oublié de saluer le bâtonnier. Le jeune stagiaire fut mandé, à son retour à Paris, dans le cabinet du grand maître et « savonné » d’importance.

Car, en dehors des châtiments sévères qui frappent l’avocat dans l’exercice de sa profession à la suite d’un manquement grave à ses devoirs, il y a les peines morales. Il y a les réprimandes. Elles sont ridicules et humiliantes. Ceux qui les subissent sont des hommes : ils comparaissent, comme des enfants, devant le bâtonnier, qui est juge de leurs fautes, même légères, et qui les apprécie « en bon père de famille ». Cela n’enlève-t-il point à ces hommes un peu de leur dignité ? Cela ne rabaisse-t-il point leur caractère ?

Mais il faut lire les arrêts du conseil.

En voici un du 2 février 1887 : « Troubler par des actes inconvenants la paix publique, fréquenter les cafés avec peu de décence et de manière à s’attirer d’humiliants sarcasmes, se dé-