Page:Leroux - Sur mon chemin.djvu/209

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
195
LES CONSERVES M. H.

M. Person s’avance, le front serein et de l’allure d’un homme qui n’a rien à se reprocher, ayant travaillé toute sa vie au bonheur de ses concitoyens.

— Vous vendiez de la viande de cheval ? de la mauvaise viande de cheval ! ajoute presque rageusement le président qui, dès l’abord, prend une attitude déplorable vis-à-vis de la cuisine hippophagique. Et cette viande de cheval, vous la disiez d’oie ou de dindon ou de chevreuil. Qu’avez-vous à dire pour votre défense ?

— Mais que voulez-vous que je dise, monsieur le président, je ne croyais point mal faire. Voilà huit ans que j’exerce honorablement mon métier dans la partie que j’ai choisie, et mon prédécesseur n’agissait point autrement que moi.

L’inculpé regarde le président avec une stupéfaction visible et semble se demander comment un homme aussi intelligent que le président de la huitième chambre a encore des illusions sur le commerce des boîtes de conserve.

Il répète :

— Je ne croyais pas mal faire, attendu que tous ceux qui préparent des viandes le font de la sorte.

Et il ajoute avec force :

— Il en est ainsi dans toutes les charcuteries et dans toutes les salaisons.

Le président considère les assesseurs d’une mine navrée et semble les prendre à témoin qu’il ne mangera plus que des œufs à la coque.