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SUR MON CHEMIN

petite Loïe Fuller de douze ans qui faisait le grand écart. Oh ! un grand écart de carême !

Vous vous rappelez l’autre Loïe Fuller, la vraie. Pas celle qui nous fut montrée dernièrement aux Folies-Bergère, dans un flamboiement qui nous aveugla, pas celle qui ne fut qu’un écran sur lequel vinrent se refléter cent phares ingénieux, mais l’autre, la première, celle qui dansa ? celle qui nous apparut dans l’envolement savamment désordonné et rythmé des étoffes soyeuses, fleur ou papillon ? Vous n’avez pas oublié sa grâce que je croyais à jamais perdue. Eh bien ! nous avons retrouvé, hier, cette grâce première dans une petite fille du monde qui a douze ans et qui a appris à faire la Loïe Fuller pour les pauvres ! C’est tout de même admirable, que de la volupté de cela on ait fait la chasteté de ceci. Mlle Lucile n’a pas de maillot comme l’autre ; elle a des petits bas verts et des petits pantalons à dentelles que l’on voit de temps en temps quand, de sa légère tunique verte à petits plissés, elle fait la tulipe ou la cloche ; et puis, à la fin, elle s’allonge, s’allonge, les jambes écartées, les bras en corbeille, le sourire en fleur. C’est le grand écart chaste et joli pour petites filles du grand monde. Je vous dis que l’esprit de charité accomplit des prodiges.

C’est l’entr’acte maintenant avant le premier acte du Pardon de Ploërmel, Je vais dans la coulisse du grand monde. Des commissaires spé-