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Page:Leroyer de Chantepie - Chroniques et Légendes.djvu/50

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III

C’est en tremblant, ma chère Rose, que je commence ici la révélation des funestes événements qui m’ont à jamais enlevé le repos, et qui vont peut-être me ravir votre confiance. Soyez miséricordieuse, ma chère Rose, et ne me jugez pas trop sévèrement.

Les premières années de ma vie furent pures et calmes comme un jour sans nuages.

Mon père était espagnol, ma mère française ; le premier m’avait légué l’ardeur et l’emportement des passions fougueuses, et l’autre la vivacité et l’imprévu de son caractère.

J’avais perdu mon père de bonne heure ; ma mère, qui m’aimait d’idolâtrie, refusa de se remarier, et quelles que soient les affections que je rencontrerai désormais dans la vie elles n’égaleront jamais celle que ma mère avait pour moi.

Je fis de brillants débuts dans le monde, et j’y rencontrais une jeune créole, nommée Azélie Mendoce, dont la beauté me charma.

Orpheline presqu’en naissant, elle avait été élevée par un frère de son père, Emmanuel Mendoce, qui n’avait qu’un autre neveu, cousin d’Azélie et nommé Ambrosio Mendoce ; son père, comme celui d’Azélie, était mort sans fortune, et il vivait en Espagne dans la famille de sa mère. Quant à son oncle, Emmanuel Mendoce, qui ne s’était point marié, il possédait une grande fortune, augmentée par d’heureuses spéculations commerciales.