Page:Les Œuvres libres, numéro 7, 1922.djvu/170

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d’or. Un hilarant tableau, vraiment, que la baronne Nirvâne des Illeuls, Nirvâne étant son petit nom. Elle était, pour le bonheur de son mari, veuve. On la tolérait ainsi, et certains, même, la recherchaient, parce que, piquée de la tarentule littéraire, elle avait produit quelques romans revendiquant la supériorité sociale pour les femmes.

— Voyons ! voyons, docteur ! que nous racontez-vous là... faisait sa voix de contralto.

— Absolument, madame !.... affirmait avec impatience l’organe criard et suraigu de Tornada.

— Changer le sexe à volonté, mais, vous voulez plaisanter !

— Je ne plaisante pas, madame. Avez-vous plaisanté le jour où vous avez voulu, vous, donner l’illusion que le vôtre était changé ?

— Moi... moi, la modification n’est, hélas ! que dans le costume... ce n’est que de la contrefaçon... riposta la baronne, avec un éclat de rire qui propulsa des ondes adipeuses hors de son col droit. Mais, transmuter dans sa chair un animal mâle en femelle, voilà qui dépasse l’imagination ! Comment s’y est-on donc pris ? Racontez-nous cela. Ah racontez, docteur !

Il était manifeste que cette question l’intéressait prodigieusement. Elle n’était pas la seule, du reste, à y trouver de l’intérêt, attendu que les sujets ayant trait à la génération ont le don de passionner l’universalité des humains ; et toutes les oreilles, y compris les miennes, et même celles de Rolande, je m’en aperçus alors, étaient curieuses de recueillir les explications du professeur.

Mais Tornada ne satisfit pas notre légitime désir d’apprendre. De toute évidence, le sujet entamé par la baronne, bien qu’il eût trait à une récente découverte biologique, l’importunait à l’extrême. Il manifesta son impatience par un tic qui tordait la commissure de ses lèvres et ré-