Page:Les Œuvres libres, numéro 7, 1922.djvu/208

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duisait en débutant. Il devait mieux s’y connaître en chevaux...

Nous parvînmes cependant sans encombre au Bois. Un soleil radieux y avait amené pas mal de promeneurs. Allée des Acacias, nous laissâmes la voiture pour faire quelques pas. Mon fiancé paraissait n’y être connu de personne. Il distribuait cependant, d’une allée à l’autre, des coups de chapeau et faisait des gestes de sympathie auxquels je remarquais qu’on répondait avec étonnement. Par contre, j’obtins un certain succès. Les messieurs se retournaient sur moi. Des dames en firent autant. J’eus plaisir à le constater. L’orgueil féminin s’éveillait en moi.

À midi, nous étions de retour à ma demeure. Qu’est-ce que la fatalité me réservait ?

— Ma poulette, me dit mon fiancé, j’espérais déjeuner avec vous, mais ça n’a pas pu coller, rapport à mes affaires. Et, ce soir, je pars en voyage pour deux jours. C’est pas de chance. Mais jeudi je serai là, et nous pourrons dîner.

— De quelles affaires vous occupez-vous ? questionnai-je.

— Je suis dans les vins. Et, justement, je fonde une maison à Lille. Oui, c’est là que je vais pour ça. Faut des capitaux, vous savez... Aussi, notre mariage tombe bien, votre fortune va me servir. Je veux même vous demander de passer cet après-midi à la banque pour signer une procuration. J’ai averti : on vous y attend.

— Ah !... à quelle banque ?

— À la vôtre, au Crédit du Nord... on dirait que vous ne le savez pas ?

— Si... si...

Il attendait ma réponse avec un prodigieux intérêt. Je le sentis vénal.

— Vous signerez ?

— Mais, certainement.

Qu’est-ce que cela me faisait ? Tout ce qu’il