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— C’est moi, mylord ! — affirma M. Ashton.

— Reggie ! — reprit le lord de Galloway, — je dors mal.

— Moi, mylord, — repartit le mari de Mrs. Ashton, — je ne dors pas du tout. Ma femme m’en empêcherait si j’en avais envie : elle est, ce soir, bruyante… Mais…

— Toutes les femmes sont bruyantes, toujours ! — avait interrompu lord Nettlewood.

— Mais, — continuait Reggie Ashton, — je n’en ai d’ailleurs pas envie. Non, mylord ! En vérité, je n’ai pas envie de dormir…

Ils se turent l’un et l’autre en même temps ; et cependant, ils continuaient de marcher par la caverne, côte à côte, mélancoliques et muets ; et ils allaient ainsi de l’est à l’ouest et de l’ouest à l’est, successivement…

L’instant d’après, quelqu’un, qui se promenait comme eux, dans l’obscurité, se heurta contre eux, comme eux-mêmes s’étaient, un peu plus tôt, heurtés l’un contre l’autre. Et ce quelqu’un n’était rien d’autre que le comte de Trêves, dit par sa femme le Pou.

— Vrai Dieu ! — jura Reginald Ashton, qui, assez naturellement, devina ce dont il retournait : — vous aussi, comte !

— Moi aussi ? — répéta l’autre, interrogatif et maussade.

— Vous aussi ! — redit Ashton : — j’entends vous comme moi, vous ne dormez pas, parce qu’une femme vous empêche de dormir ?

— D’honneur, — fit Trêves, — c’est vrai à moitié… mais seulement à moitié, Sir Reggie ! Car je viens de vous entendre, et vous avez dit à Sa Seigneurie que vous n’aviez pas envie de dormir, encore que, si vous aviez eu cette envie, Mrs Ashton se fût chargée de vous l’ôter. Pareillement a fait, pour moi, Mme de Trêves. Je