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Pierre. — Je t’assure, j’ai besoin de repos.

La Paysanne. — Tu as une mine superbe. Non ! La vérité, c’est que tu as honte…

Pierre. — Moi ? Oh ! là ! là ! Honte de quoi ?

La Paysanne. — D’avoir été en prison. Mais tu n’as rien fait de mal, voyons ! Pour avoir coupé quelques arbres…

Pierre. — Eh bien, oui ! ça me fait mal de rencontrer les autres maintenant. Ils me regardent si drôlement…

La Paysanne. — Mais non… Tu te fais des idées… Et puis, même si c’est vrai, il ne faut pas avoir honte. Il faut les regarder en face… ça leur fera baisser les yeux.

Pierre. — Ah ! c’est bien dur !

La Paysanne. — Il le faut… Allons… Viens… (Elle appelle.) Groucha !

Groucha. — Eh bien ?

La Paysanne. — Nous allons à l’église.

(Pendant ce temps, Pierre se prépare.)

Groucha. — Je vais avec vous.

La Paysanne. — Non ! non ! Toi, tu veilleras ici…

Groucha. — Sur quoi veiller ? puisque la voisine garde les enfants avec les siens, alors je n’ai pas besoin de veiller. Les voleurs ne trouveraient rien à prendre.

La Paysanne. — Qui te parle des voleurs ? Tu feras attention au feu…

Groucha. — Le feu se garde bien tout seul.

La Paysanne. — En voilà une raisonneuse ! Je veux que tu restes ici, c’est compris !

Pierre. — Pourquoi ?

La Paysanne, bas. — Pour qu’elle n’entende pas les réflexions des imbéciles.

Pierre. — Ah ! Bon ! Eh bien, reste ici, Groucha ! En revenant, je te taillerai une belle poupée dans du bois.

Groucha. — Oh, oui ! Tu tailles si bien dans le bois.