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Page:Les œuvres libres - volume 42, 1924.djvu/358

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— T’es donc encore souffrante annui (aujourd’hui), bonne Rose ? Pas de chance. T’auras jamais de mari, cousine, si t’es pas vaillante en santé, Le mal, ça chasse les galants.

Rose se méprit à son tour à cette attitude de son amie. Pourquoi était-elle si calme ? Et cette allusion aux galants ? Au lieu d’y voir une suite naturelle à leur propos de tout à l’heure, sa cervelle défiante et jalouse lui suggéra cette pensée :

« Peut-être bien que tu n’en manques pas, toi, de galants, ma chère ? Et celui-ci, j’en jurerais, est sous ton lit par ta permission. Comptes-y que je vas servir de chaperon à ton amoureux ».

Mais ce fut un simple aparté. Dédaignant d’interroger sa cousine, et bien rassurée maintenant, elle rajusta en hâte ses chaussures et dit seulement d’un ton piqué :

— Oui, je me sens souffrante ce soir, et ça me ferait deuil de troubler ta nuit. Laisse- rentrer chez mes gens.

— Comment, tu veux me faire rhabiller ? Est-ce que je ne te soignerai pas aussi bien que chez toi ? J’ai de l’eau des quatre-voleurs, de la tisane des quatre-fleurs…

— Je veux rentrer. Passe seulement ta mante et mets mé à la porte, que ton chien ne me mâque (mange) point.

Denise céda et ferma le grand porte sur un bonne nieut ! (bonne nuit) tout sec de sa cousine. Puis elle remonta quatre à quatre, et n’ayant fait qu’enfiler ses petons dans des savates et couvrir ses épaules de la mante de défunt sa grande, elle fut vite déshabillée.

L’innocente fille, quelques secondes accouvée sans rien voir, fit tinter d’un vase la faïence sonore. Une senteur flotta dans la chambre. Et vite, elle se coula dans le lit. Elle mouilla le bout de son doigt majeur dans la valve d’un coquillage abrité de buis, se signa et s’endormit dans ses cheveux, un bras pendant hors de la couche, l’autre replié sous sa tête, montrant le chaud mystère de son aisselle.