Page:Les Caquets de l'Accouchée.djvu/58

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qui se racontent par la multitude des femmes qui la viennent voir, et en tenir bon registre ; et par ainsi vous aurez non seulement dequoy contenter vostre esprit, mais aussi cela vous fera rajeunir et remettre en vostre pristine santé.

Advis que je trouve assez bon, qui fut cause que, d’une pleine liberalité, je leur donne à chacun leur droict de consultation, avec promesse de loüange si ma santé en augmentoit.

Or, pour l’executer dès le lendemain, je me fais conduire sur le Pont-Neuf, où je taschois à aller le petit pas ; mais il me fut impossible, pour estre poussé et foullé par une multitude de petit peuple de toutes sortes d’estats, qui avoient quitté leur boutique pour venir voir le charlatan4 : les uns y menoyent leurs enfans plus soigneusement qu’au sermon, les autres estoient huyez par leurs femmes, qui se lamentoyent de n’avoir point de pain à la maison ; et neantmoins que leur meschant mari s’amusoit à la farce plus qu’à sa besongne ; et bref, quant je fus arrivé sur le lieu, j’y vis une si grande confusion, meslée de querelles et de batteries, pour les couppe-bourses qui s’y rencontrent, que je n’eus le loisir que d’entendre trois ou quatre mots de leur science, qui m’estonnèrent de prime face, parce que le char-


4. C’étoit sans doute soit Mondor, soit Desiderio Descombes, dont il sera parlé plus loin.