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EN BELLE HUMEUR


portoit les couleurs de la marquise de Maintenon. C’étoit une belle fille, la nièce d’un riche marchand juif que l’on habilloit de la sorte, afin de la déguiser, et le page demeuroit jusqu’à minuit à recevoir les ordres du père La Chaise qui lui apprenoit apparemment le commerce d’amour.

Un soir, comme le père étoit dans son cabinet de verdure, et qu’il tenoit son joli page sur ses genoux, il lui disoit tendrement : M’aimerez-vous toujours, ma petite Clotte ? (c’étoit le nom qu’il lui donnoit). Je vous ferai plus de bien que votre oncle avec toutes ses richesses si vous persistez à m’aimer. — En doutez-vous, mon père, repartit la demoiselle agréablement, pourrois-je placer mieux mon amitié que chez vous, qui la conserverez précieusement ? — Oui, mignonne, je vous promets de n’aimer jamais que vous, reprit le jésuite en la baisant. Vous savez, continua-t-il, que les personnes de notre caractère sont plus constantes que les autres par de certaines raisons de politique. — Il est vrai, mon père, mais je crains quelque chose de fâcheux depuis notre dernière entrevue, répondit Clotte en soupirant. — Eh ! que craignez-vous, ma belle, dit-il, pouvez-vous appréhender quelque chose avec moi ? Parlez, mon petit enfant, et ne soupirez pas davantage. — Hélas ! mon révérend père, répondit cette jeune fille en