Page:Les Jésuites de la maison professe de Paris en belle humeur, 1874.djvu/84

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
70
LES JÉSUITES


marquise de Montespan en poussant un soupir, vous savez qu’elle m’a enlevé le cœur du roi, et c’est une chose que je n’oublierai jamais. La méchante, par ses airs affectés et complaisants, a surpris la tendresse de ce prince, qui ne m’a jamais aimée depuis ce fatal moment où il la vit dans ma chambre, lorsqu’elle écrivit une lettre à sa majesté qui lui parut remplie de charmes. — Madame, vous devez rendre plus de justice à cette dame, reprit le père La Chaise, et condamner l’inconstance de ce monarque : s’il vous avoit effectivement bien aimée, sa majesté n’auroit pas changé. — Mais, mon père, dit la dame en souriant, peut-on bien aimer et être inconstant ? Définissez-moi cette pensée. — De bonne foi, madame, je ne suis pas assez consommé en matière d’amour, répondit le jésuite en riant et dissimulant, pour bien définir ce que vous souhaitez ; vous en savez plus que moi de ce côté-là ; une personne comme vous qui a été toute adorable peut-elle me demander rien là-dessus ? — Mon père, reprit la marquise d’un ton agréable, si j’en sais quelques petites choses, ce n’est pas par science. — Eh bien, madame, dit le religieux en lui serrant la main, c’est peut-être par expérience, c’est toujours savoir. — Il est vrai, mon père, repartit la dame en changeant de discours, conseillez-moi quel habit je prendrai, afin de contrefaire la bigote. — Ma-