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V
NOTICE

houris soient très variés, toutes sont d’une beauté merveilleuse, et chacune d’elles n’a point son égale au monde.

Parfois, le conteur groupe ces créatures idéales : toute une légion de beautés défile devant le jeune premier, qui sent à chaque instant son cœur lui échapper. Enfin apparaît celle qui est destinée à l’heureux mortel, et celle-là est naturellement cent fois plus belle que toutes les autres. Aussi notre amoureux s’évanouit-il, et l’on comprend qu’en effet il soit à bout de forces.

Il arrive, d’ailleurs, souvent aux amants des contes orientaux de s’évanouir. Rien ne trouble leur sangfroid, rien n’émeut leur bravoure, si ce n’est la beauté de leurs dames ou la crainte de leur avoir déplu. Dans ces deux cas, aucun ne manque à tomber en pâmoison.

Si l’on ignorait combien les Orientaux aiment le luxe, la magnificence, on l’apprendrait par leurs contes. Tous les jardins qu’ils nous décrivent sont des Édens, et les palais sont d’une richesse à défier tous les artifices de la féerie théâtrale.

Nous sommes bien forcés de l’avouer, la gourmandise et l’intempérance sont les péchés favoris des enfants de l’Orient, et loin de s’en cacher, ils revêtent ces imperfections des couleurs les plus séduisantes. Dans la plupart de leurs contes, les personnages festoient, mangent les mets les plus délicats, boivent les liqueurs les plus agréables ; le vin lui-même (voile-toi la face, ô Mahomet !) coule délicieusement le long de leurs gosiers. Presque toujours aussi leurs femmes, même les plus poétiques, font la débauche[1] soit avec leurs esclaves, soit avec leurs amants.

De nombreux recueils de contes orientaux ont été publiés en France depuis le commencement du XVIIIe siècle, mais

  1. Débauche a ici le sens de festin.