Page:Les Mille et Un Jours, trad. Pétis de la Croix, 1919.djvu/23

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
7
CONTES ORIENTAUX

Majesté, aucun prince au monde n’est plus généreux que lui. »

Le calife rougit à ce discours ; ses yeux s’enflammèrent de dépit. « Sais-tu bien, dit-il, qu’un sujet qui a l’audace de mentir devant son maître, mérite la mort ? — Je n’avance rien qui ne soit véritable, repartit le vizir. Dans le dernier voyage que j’ai fait à Basra, j’ai vu cet Aboulcasem : j’ai été chez lui ; mes yeux, quoique accoutumés à vos trésors, ont été surpris de ses richesses, et j’ai été charmé de ses manières généreuses. » À ces mots, l’impétueux Haroun ne put retenir sa colère. « Tu es bien insolent, s’écria-t-il, de mettre un particulier en parallèle avec moi. Ton impudence ne demeurera point impunie. » En disant cela, il fit signe au capitaine de ses gardes d’approcher, et lui commanda d’arrêter le vizir Giafar. Ensuite il alla dans l’appartement de la princesse Zobéide, sa femme, qui pâlit d’effroi en lui voyant un visage irrité.

« Qu’avez-vous, seigneur, lui dit-elle, qui peut causer le trouble qui vous agite ? » Il lui apprit ce qui venait de se passer, et il se plaignit de son vizir dans des termes qui firent comprendre à Zobéide jusqu’à quel point il était en colère contre ce ministre. Mais cette sage princesse lui représenta qu’il devait suspendre son ressentiment et envoyer quelqu’un à Basra pour vérifier la chose : que si elle se trouvait fausse, le vizir serait puni : qu’au contraire, si elle était véritable, ce qu’elle ne pouvait penser, il n’était pas juste qu’on le traitât comme un criminel.

Ce discours calma la fureur du calife. « J’approuve ce conseil, madame, dit-il à Zobéide, et j’avouerai que je dois cette justice à un ministre tel que Giafar. Je ferai plus : comme la personne que je chargerais de