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LES MILLE ET UN JOURS

petit page aussi beau que le soleil. Cet aimable enfant avait une robe de brocart d’or, relevée de perles et de diamants. Il tenait dans sa main une coupe faite d’un seul rubis et remplie d’un vin couleur de pourpre. Il s’approcha du calife, se prosterna devant lui jusqu’à terre et lui présenta la coupe. Le prince avança sa main pour la recevoir, et l’ayant prise il la porta à sa bouche ; mais, ô prodige étonnant ! après avoir bu, il s’aperçut en la rendant au page, qu’elle était encore toute pleine. Il la reprend aussitôt, et l’ayant reportée à sa bouche, il la vide jusqu’à la dernière goutte. Il la remet ensuite entre les mains du page, et à l’instant même il voit qu’elle se remplit sans que personne verse rien dedans.

À cet objet merveilleux, la surprise d’Haroun fut extrême, et lui fit oublier l’arbre et le paon. Il demanda comment cela se pouvait faire. « Seigneur, lui répondit Aboulcasem, c’est l’ouvrage d’un ancien sage qui possédait tous les secrets de la nature. » En achevant ces paroles, il prit le page par la main et sortit de la salle avec précipitation. Le calife en fut indigné. « Oh ! pour le coup, dit-il, ce jeune homme a perdu l’esprit. Il m’apporte ses curiosités sans que je l’en prie ; il les offre à mes yeux, et quand il s’aperçoit que je prends le plus de plaisir à les voir, il me les enlève. Il n’y a rien de si ridicule ni de si malhonnête. Ah Giafar ! je vous apprendrai à mieux juger des hommes. »

Il ne savait que penser du caractère de son hôte, ou plutôt il commençait à n’en avoir pas bonne opinion, lorsqu’il le vit rentrer pour la troisième fois, suivi d’une demoiselle toute couverte de perles et de pierreries, et plus parée encore de sa beauté que de ses ajustements. Le calife, à la vue d’un si bel